J’ai toujours été attiré par les objets d’occasion ayant multiplié les vies.
Mon oeil toujours inquisiteur aime traîner dans plusieurs vides greniers et je me surprends encore à regarder ces meubles et objets que les gens déposent tout simplement au pied de leur immeuble.
J’aime à imaginer leur histoire, leur provenance.
J’adore le fait qu’ils nous survivent et passent les siècles en transportant des secrets, des symboles..,
Je n’ai pas besoin de les posséder mais leur éventuel parcours me remplit de grandes questions sans réponse.
Avant-hier, je rentrais et j’ai aperçu des meubles près d’un immeuble.
Une chaise soutenait une étagère cassée.
Et puis au milieu d’eux, un vase en verre essayait de se faire une place.
Je me suis approchée et puis j’ai fini par le prendre dans mes mains.
Intact, il n’avait que quelques traces de terre sur ses parois.
Je l’ai soupesé comme si son poids avait pu m’éclairer sur son existence de vase.
J’ai trouvé cela un peu triste qu’il est atterri là, sur le béton d’une rue isolée.
Et sans trop y réfléchir, je l’ai emmené avec moi et sur le chemin, je me suis pris doucement à lui imaginer un passé d’objet important.
Ce vase aurait été acheté pour une occasion singulière.
Par une personne ayant reçu des fleurs et ayant décidé que ces fleurs là avaient trop d’importance pour ne pas finir exposer correctement, dans un vase.
Ces fleurs dans ce vase avaient été balayés plusieurs fois, dans une même journée, par des regards chaleureux.
Le verre délicat effleuré par des doigts heureux.
Mais une fois les fleurs passées, fanées, ce vase vide était devenu un douloureux rappel de l’instant de joie envolé.
Il n’y avait plus eu d’aussi belles fleurs.
Son propriétaire avait essayé d’y planter autre chose mais rien n’avait pris.
Comme pour confirmer que l’instant unique s’était évaporé à jamais.
Le cœur mélancolique, il avait fini par être déposé dehors sur le trottoir.
Il n’y avait eu que cette issue pour son propriétaire qui n’avait pu se résoudre à le jeter, à détruire sa symbolique.
Impossible non plus de le vendre, de le donner.
Alors ce vase avait fini entre une chaise et une étagère.
Je l’ai serré contre moi, appréciant ma douce fiction.
Et puis, nous sommes arrivés et on m’a rappelée que c’était mon fort de personnaliser les objets.
J’ai un peu ricané de mon exubérance mais je me suis souvenue que nous, adultes, on a souvent tendance à oublier d’admirer les petites choses, de les magnifier dans notre imaginaire.
Le vase trône fièrement, il commence une nouvelle étape de son histoire d’objet inanimé.
Je ne sais pas vraiment d’où il vient, je sais juste qu’il est, pour moi, le symbole des possibles, des opportunités là, au coin d’une rue, des imprévus qui prennent pourtant sens.
Le symbole qu’il y a toujours un petit quelque chose qui vous attend sur votre chemin.